Sites et sols pollués

5. Les friches industrielles, sites et sols pollués

Le territoire lorrain est marqué par les séquelles des activités industrielles passées - sites et sols pollués - dont la résorption complexe reste d’actualité.

indicateur 3 - Traitement des sites et sols pollués

a) Une région profondément touchée
La Lorraine figure parmi les quatre premières régions françaises les plus concernées par la gestion, le traitement et la requalification des friches industrielles et des sites pollués. Ces zones dégradées sont inégalement réparties depuis les frontières belges et allemandes jusqu’au sud des Vosges. Apparues en Lorraine dans les années soixante avec la crise du textile et des mines de fer, les friches industrielles se sont multipliées ensuite avec le recul des activités sidérurgiques et charbonnières. Près de 6 000 ha de sites industriels ont ainsi été abandonnés, souvent pollués, situés en vallées alluviales ou dans des secteurs urbanisés, y compris au coeur même des agglomérations. Le problème des sites pollués ne faisait pas encore l’objet d’une réelle prise de conscience en France quand la politique régionale de traitement des espaces dégradés a été engagée en 1986.

De multiples efforts ont été entrepris pour mener à bien une politique de traitement des friches industrielles, et la requalification de certains sites est maintenant visible en Lorraine. Toutefois, les problèmes engendrés par les sites pollués sont encore loin d’être résolus.

b) Appliquer le principe pollueur-payeur
Les friches industrielles contiennent souvent des sites pollués. Un site pollué est un site qui, du fait d’anciens dépôts de déchets ou d’infiltration de substances polluantes, présente une pollution susceptible de provoquer une nuisance ou un risque pérenne pour les personnes ou l’environnement. C’est en 1986, lorsque l’Établissement public de la métropole lorraine (EPML, devenu Établissement public foncier lorrain, EPFL) s’est rendu propriétaire de nombreux sites sidérurgiques et charbonniers, que les problèmes de pollution des sols et sous-sols ont été découverts. Cet établissement s’est alors retourné, en coordination avec la DRIRE (DREAL), vers les anciens exploitants (Usinor-Sacilor, etc.) pour que ceux-ci procèdent au traitement des sites, en application du principe du pollueur-payeur. Cette démarche a permis de traiter plusieurs sites importants, soit par une élimination ou évacuation des pollutions, prise en charge par les anciens exploitants (à Longwy, Micheville, Senelle), soit par un confinement de ces pollutions, articulé avec les travaux de requalification (Amnéville, Rehon). Parfois, pour les pollutions légères, le végétal a peu à peu permis d’assainir le site (méthode de « phyto-remédiation » : des espèces végétales adaptées sont plantées, suivies puis récoltées). Mais souvent, dans les zones gravement polluées, il a fallu opter pour une solution plus « lourde » : enlever les milliers
de mètres cubes de terres polluées, les retraiter en usine par combustion ou traitement chimique, construire des cuvelages, isoler le site et pomper pendant plusieurs années les eaux polluées. Certains sites pollués placés au cœur du tissu urbain sont souvent considérés comme un réservoir foncier potentiel pour le redéploiement de nouvelles activités. D’où la nécessité d’une grande vigilance car ce redéploiement ne sera peut-être pas possible étant données les séquelles environnementales. Des servitudes peuvent être instituées sur les terrains pollués ainsi que sur les sites de stockage de déchets ou d’anciennes carrières. Ces servitudes peuvent en outre comporter la limitation ou l’interdiction des modifications de l’état du sol et du sous-sol et permettre la mise en œuvre de prescriptions relatives à la surveillance du site.

Les sites et sols pollués

 

c) Une démarche d’inventaire et de suivi
En 2008, la base de données nationale recensant les sites et sols pollués ou potentiellement pollués appelant une action des pouvoirs publics à titre préventif ou curatif (BASOL) recensait 360 sites en Lorraine, soit près de 8% de l’effectif national. A ce titre, la Lorraine figure parmi les quatre premières régions françaises les plus concernées par la gestion, le traitement et la requalification des friches industrielles et des sites pollués. Les sites figurant dans cette base de données sont ceux pour lesquels des actions restent exercées par l’administration au titre de la réglementation des installations classées pour la protection de l’environnement. Ces actions permettent d’améliorer la connaissance de l’impact environnemental et sanitaire des sites pour lesquels une contamination a été mise en évidence, de mettre en ouvre les mesures de gestion qui s’avèreraient nécessaires et enfin de s’assurer que toutes les mesures seront prises afin que la mémoire de ces pollutions soit maintenue.

Sur la base de ces actions et des différents diagnostics réalisés sur les installations classées en fonctionnement ou à l’arrêt, cette base de données est régulièrement mise à jour par l’inspection des installations classées. À ce recensement viennent s’ajouter les inventaires régionaux des sites ayant été occupés par d’anciens sites industriels et activités de service (BASIAS). S’agissant d’un recensement historique destiné à conserver la mémoire des sites, notamment en vue de la planification urbaine, et établi sur la base d’archives, l’inscription d’un site dans cette base de données ne préjuge toutefois pas qu’il soit le siège d’une pollution. Ces inventaires réalisés par le BRGM sont disponibles à ce jour pour les départements de la Moselle et de la Meurthe-et-Moselle dans lesquels plus de 10 500 sites ont été inventoriés. Ils sont en cours de réalisation pour les Vosges et la Meuse.
Si la prévention reste aujourd’hui le meilleur moyen de gérer la problématique de pollution des sols, l’héritage du passé industriel lorrain amène toutefois les acteurs régionaux à composer aujourd’hui avec les contraintes qui en découlent. En outre, la pression foncière dont la région Lorraine fait aujourd’hui l’objet accroît singulièrement la nécessité de recycler les sites contaminés en vue d’une reconversion urbaine. Ce en vue de parvenir à une gestion raisonnée des espaces et de privilégier le recyclage des espaces urbains plutôt que l’extension sur les espaces ruraux périphériques.

d) Des situations de blocage
Certains sites importants, acquis par l’EPFL et requalifiés au niveau paysager, n’ont pu être dépollués à ce jour par l’ancien exploitant, pour des raisons techniques ou financières. Leur réutilisation à des fins nouvelles est complètement ou partiellement bloquée (cokeries de Micheville et Forbach-Marienau, d’Homécourt, Hagondange). Dans le cas de propriétaire inconnu, disparu ou insolvable, le fonds alimenté par la taxe sur les déchets industriels spéciaux, géré par l’Ademe, prend en charge le traitement du site, à une échéance dépendant du degré d’urgence et du rang sur la liste d’attente. Enfin, aujourd’hui, la multiplication des dossiers et les conséquences financières lourdes pour les anciens exploitants conduisent ceux-ci (et singulièrement Bail-Industrie, propriétaire du patrimoine délaissé d’Usinor- Sacilor) à bloquer désormais toute cession de terrains présumés pollués à l’EPFL ou aux collectivités, afin de limiter les pressions visant à accélérer la dépollution voire à souhaiter racheter tout ou partie (polluée) de sites précédemment aliénés. Cette position aboutit à un gel de plusieurs sites importants et à un coup d’arrêt du processus de requalification des espaces dégradés. Ces sites sont diagnostiqués et font l’objet d’une surveillance de l’impact éventuel sur l’environnement.

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